Death of the party

Ce weekend m'a laissé une impression étrange et un peu désagréable.

 

J'ai fait un saut très rapide à Rock en Seine hier dans l'après-midi. La veille, les frères Gallagher, qui étaient la tête d'affiche du vendredi, se sont frités quelques heures avant de monter sur scène. Résultat : annulation de leur prestation et split d'Oasis. En même temps, Oasis, c'était vaguement pourri non ?

 

Rock en Seine, c'est un peu le festival spécialisé depuis maintenant trois années consécutives dans l'annulation de tête d'affiche, Amy Winehouse leur ayant fait faux bond deux années de suite. Un festival qui n'arrive toujours pas à se forger une identité, qu'elle soit sonore (une programmation souvent fourre-tout et incohérente, entre le festival des Inrocks, Belfort et la fête à neuneu) ou visuelle (le parc de Saint Cloud, ça vaut pas vraiment le fort de Saint-Père). Quant à l'ambiance en elle-même, elle n'est pas spécialement fantastique : on a souvent l'impression que l'évènement n'en est pas un, justement, et qu'il représente juste une occasion parmi tant d'autres dans l'année pour quelques étudiants Parisiens de se retrouver entre potes et de descendre quelques bières en prenant des photos avec leur iPhone. Il n'y a pas de magie, de communion, de spécificité, de truc dans l'air. On a l'impression que les gens ne font qu'y passer. C'était d'ailleurs mon cas : j'ai vu l'impeccable prestation des Noisettes, le rock baba un peu chiantos des Asteroids Galaxy Tour, un concert très énergique - c'est le moins qu'on puisse dire - de Ebony Bones, et nos amis les chauve-souris de The Horrors.

 

Le soir tombé, je me suis rendu au Grand Rex, pour une soirée hommage à Michael Jackson, à l'occasion de ce qui aurait du être la date de son 51ème anniversaire. Malgré une méfiance bien légitime quant à une récupération purement mercantile de la mort de la vache à lait de l'année, je dois bien dire que j'ai passé un bon moment. Les clips de l'artiste étaient diffusés, entrecoupés de docus "exclusifs" et d'interventions d'invités venus témoigner. C'était bien sûr on ne peut plus émouvant et jouissif de redécouvrir le clip de "Thriller" sur grand écran. Mais "Black or white", dont j'avais oublié à quel point il était drôle et tordu, m'a fait un sacré effet aussi, contre toute attente. La venue sur scène de Philippe Manoeuvre, notre Philou national, et d'Olivier Cachin, auteur de la passionnante biographie "Michael Jackson : Pop life", ont été la preuve que les organisateurs (M6 principalement) ont voulu faire les choses bien, afin d'éviter les foudres des fans de l'artiste, venus de toute la France (la salle était complète), dont on sait à quel point ils sont exigeants, dans un mélange de maniaquerie et de dévotion. On a pu noter quelques couacs (un son un peu foireux, des sous-titres parfois absents, dommage pour des clips souvent bavards, un animateur des petits matins d'M6 un poil agaçant en maître de cérémonie). Mais c'était chouette.

 

Alors, vous allez me dire, pourquoi avoir gardé de ce weekend un sentiment un peu bizarre ? Eh bien, durant toute la journée, j'ai eu la drôle de sensation de danser sur les ruines d'un autre temps. Je suis allé à un festival en 2009, qui a programmé cette année en têtes d'affiche des gloires 90s lessivées comme Faith No More, Offspring, The Prodigy ou Oasis (pour le résultat que l'on connait). Et le moment fort de ma soirée a été de regarder un clip vidéo sorti sur les écrans il y a plus de 25 ans, entouré de gens hystériques, qui pour certains n'étaient pourtant pas nés à l'époque. Un clip tiré d'un album qui continue à se vendre par millions, mais dont l'interprète n'est plus là pour toucher les dividendes. Après la mort du disque, la mort de l'entertainment ? A force d'agiter des cadavres (et je ne parle même pas de U2 et de Madonna), le monde de la pop ressemble de plus en plus à un cimetière des éléphants dont la mélancolie nous contaminera sans doute plus vite et plus profondément que la grippe A cet hiver.

 

Et, comme si cela ne suffisait pas, René Morizur, le plus discret des Musclés, s'en est allé mercredi.