Factory Girl

factory girl

Trois ans se sont écoulés depuis cette reprise de sinistre mémoire : en 2007, Julien Doré massacrait "Moi Lolita" d'Alizée, en prenant soin d'enlever minutieusement toute trace de pop du morceau original, pour le transformer en l'une de ces tristes rengaines folk alors très en vogue à l'époque. Alizée sortit par la suite son troisième album dans l'indifférence générale, tandis que le faux dandy dégingandé vendait ses sketchs musicaux par millions. Mais depuis, le vent a tourné (haha). La pop a de nouveau le vent en poupe (ok j'arrète là avec les allusions climatiques), et Alizée s'apprête à réaliser un comeback assez stupéfiant.

 

On en aura entendu parler, de ce fameux album. En couverture de Technikart le mois dernier, on apprenait qu'elle travaillait avec Château Marmont et les artistes électro du label Institubes, afin de produire un disque à tendance pop-italo-disco mélancolique inspiré par la vie d'Edie Sedgwick. Rien que ça. A titre de comparaison, c'est un peu comme si Ke$ha devait produire un album concept sur Robert de Montesquiou.

 

Le résultat est pourtant à la hauteur de toutes les espérances, et même bien au delà. Les deux premiers titres apparus sur le web sont incroyables. Alizée se recentre ici sur son vrai job idéal : interprète mainstream de chansons pop exigeantes et inspirées. Tentative semi-foirée à l'époque Farmer-Boutonnat, le concept Alizée prend ici tout son sens : la chanteuse pop est un média, une voix et une image à modeler selon les aspirations de jeunes producteurs qui se font les dents. En ce sens, l'album à venir (intitulé "Une enfant du siècle") porte bien son nom, Alizée se rapprochant d'une Britney Spears période "Blackout" : c'est un objet pop dans les mains de talentueux faiseurs de sublimes pop songs. Oui, en interview et dans la vie, Alizée et Britney sont juste des cagoles qui ne savent pas nécessairement ce qu'elles font. Oui Alizée préfère acheter des baskets sur Ebay et faire la popote plutôt que traîner dans les endroits louches et prendre de la drogue. Alizée n'est ni Edie Sedgwick, ni Kate Moss, ni Courtney Love, ni Lady Gaga. Elle n'est pas sulfureuse, elle n'incarne rien, elle chante, juste (enfin pas toujours d'ailleurs). Pourtant, avec cet album, le métier d'interprète reprend un peu de lustre et de valeur, laissant les Julien Doré à leur statut d'entertaineurs baudruches aussi creux et vides que leurs déclarations d'intentions sont ambitieuses. Pop 1 - Prétention 0.

 

Bien évidemment, on est un peu loin de "Moi Lolita" désormais. Reste à savoir si le grand public va y comprendre quelque chose. Certains y verront des influences de la merveilleuse Valerie Dore (aucun lien de parenté avec Julien), d'autres se contenteront de croire qu'elle a plagié Sébastien Tellier. Le nouveau label qui abrite la chanteuse, absente des médias français depuis quelques longues années déjà (elle serait big au Mexique, parait-il), a effectué un joli et efficace travail de "buzz" : deux extraits ont été envoyés à tout ce que la blogosphère compte de leaders d'opinion. Résultat : des articles élogieux sur Fluokids ou Popjustice, et une place assurée dans le top 50 de Hype Machine. Ringarde il y a trois ans, à la pointe aujourd'hui. Reste à savoir si les ventes vont suivre. Peu importe au final, Alizée a regagné le cœur des amoureux de la pop.